“Le Meilleur des mondes”

Avez-vous lu “Le Meilleur des mondes” d’Aldous Huxley ? Le livre visionnaire écrit en 1932 présente une société qui utilise la génétique, le clonage pour le contrôle et le conditionnement des individus qui sont tous conçus dans des éprouvettes. La population comporte ainsi cinq catégories de personnes des plus intelligents aux plus stupides : les Alphas (l’élite, les plus intelligents, grands, beaux, vêtus de gris), les Bétas (les exécutants, vêtus de rose), les Gammas (employés subalternes, vêtus de vert) enfin les Deltas (vêtus de kaki) et les Epsilons (vêtus de noir), ces deux catégories sont conditionnées pour les travaux pénibles. Continuer la lecture

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Plus fort que France Telecom !

Je vous ai dit que certains blogs étaient intéressants. En voilà un “L’instit Humeurs” qui relate les états d’âme et le mal être des enseignants. L’article ci dessous est daté du 19 mars 2011. Du tout frais.

Cette semaine le Progrès annonçait le suicide d’un directeur d’école du Rhône, retrouvé pendu dans sa classe quelques minutes avant que les élèves n’arrivent. Dans un mot à ses proches, il faisait part de son « désespoir et ras-le-bol ».

Il y a quelques temps Ouest France titrait « Suicide d’enseignants : malaise à l’école » un article relatant une série de suicides dans l’Education Nationale dans l’Académie de Caen.

Cité dans l’article, le Ministère de l’Education Nationale cherche évidemment à minimiser le malaise, à détacher les suicides des conditions de travail et avance des chiffres : 6 suicides pour 100 000 enseignants chaque année.

Une étude épidémiologique de l’Inserm datant de 2002 annonce quant à elle bien autre chose : 39 cas par an pour 100 000 enseignants, lesquels sont plus de 800 000…

Il s’agit selon cette étude (citée ici) de la population la plus touchée, de peu devant la police.

En 2009, Véronique Bouzou, prof de français, publiait un livre fort intéressant intitulé « Ces profs qu’on assassine », dans lequel elle partait à la rencontre des enseignants, de leurs proches, des médecins spécialisés. Les témoignages mettaient en évidence la corrélation directe entre les suicides et les difficultés du métier, la dégradation des conditions de travail, le manque cruel de reconnaissance, la solitude de l’enseignant coupé de sa hiérarchie, le tabou enfin que constitue cette question du suicide dans l’Education. L’auteur rappelait par ailleurs que les enseignants sont les seuls, avec la police, à bénéficier depuis 1959 des services d’un établissement psychiatrique dédié, l’Institut Marcel Rivière (qu’on appelle nous « la Verrière »).

Au-delà du cas emblématique des enseignants, il faut également rappeler que la France est avec le Japon le pays de l’OCDE ayant le plus fort taux de suicide, avec 16,2 suicides pour 100 000 habitants chaque année.

Soit plus de 10 000 personnes qui se donnent la mort par an dans notre beau pays. Deux fois plus que le nombre de morts sur la route, maintes fois « cause nationale »…

De quoi, messieurs les politiques, se pencher sur cette question que Camus disait être « le seul problème philosophique vraiment sérieux », non ?

Nota : avec 25 suicides en 2010, France Telecom en est tout de même à un taux de 28.7 / 100 000 sur le sol français (la moitié de ses employés sont à l’étranger) ! Encore un effort, messieurs les dirigeants, et vos employés seront aussi déprimés que ceux de l’Education Nationale…

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Solitude

L’homme est un animal social. Il a un besoin fondamental de communiquer, besoin indispensable à son équilibre (très variable selon les individus).

Dans le monde actuel où les moyens de communiquer se multiplient et sont à la portée de presque tous, où les techniques et les sciences de communication sont au programme de nombreuses formations, il semble paradoxal de constater que les individus se sentent de plus en plus seuls et  isolés.

Le trop plein d’informations nuit ; il encombre notre vie, notre cerveau et limite en fin de compte la communication interpersonnelle.

Nous prenons en pleine face des mots et surtout des images choc. Comme si les journaux, la télévision et la radio ne suffisaient pas, nos téléphones portables, tablettes électroniques, micro-ordinateurs nous donnent encore plus de nouvelles.  Elles arrivent en continu de partout (même les fausses) et nous n’y prêtons plus attention sauf quand elles sont extraordinaires, exceptionnelles, révolutionnaires… et ça ne dure pas longtemps car il y a toujours plus nouveau. On a oublié Laurent Bagbo en Côte d’Ivoire en quelques jours. Il y a eu depuis : la Tunisie, l’Egypte, la Libye, un tremblement de terre en Nouvelle Zélande. Nous attendons presque la mauvaise nouvelle suivante. Nous devenons insensibles à force de revoir et de réentendre les mêmes choses ; les guerres (surtout quand elles ne se déroulent pas chez nous), les catastrophes se banalisent et pourtant nous sommes écrasés par le poids des informations, surtout si nous sommes sensibles. Comment rester impassible devant les larmes, le sang, la violence ? Et comme si la réalité ne suffisait pas, on en rajoute un peu : du catastrophisme par là, de la démagogie ici, du dramatique ailleurs, de l’exceptionnel plus loin. Il me semble que les journalistes devaient être objectifs. Pourquoi  sont-ils de plus en plus friands de sensationnel ?  La recherche du fric ou de la “gloire” ? Pourquoi les journaux et magazines, la télévision  nous abreuvent-ils de “news people”, de concours et de jeux débiles ? Pour nous occuper ? Pour nous faire vivre par procuration ?

La vie par procuration. J.J. Goldman

La vie citadine nous rend encore plus solitaires. Combien d’entre nous sont seuls dans de grandes villes sans autres contacts que ceux qu’ils ont avec leurs collègues de travail ? La famille est éloignée géographiquement (mobilité oblige) et le grouillement des autres , leur présence « collective » nous isole dans notre espace intérieur) sans compter que nous devons faire face au bruit incessant. Quand on vit et qu’on travaille en ville, c’est une agression permanente : bruits de la circulation, sonneries des téléphones portables, musique d’ambiance, animations commerciales…

Nous ne parlons pas à l’inconnu que nous croisons dans la rue (nous ne voulons pas l’entendre, nous avons quelquefois même des écouteurs fichés dans les oreilles), ni à notre voisin quasi inconnu, ni à la caissière du supermarché, ni à la vendeuse qui nous sert (les avons-nous seulement regardés ? juste entrevus). Nous ne parlons presque pas aux membres de notre famille que nous retrouvons, harassés, en fin de journée. Les repas familiaux sont de plus en plus souvent « amputés » par l’omniprésent écran de télé.

« Ultra moderne solitude » chantait Alain Souchon, il y a quelques années et ça ne s’arrange pas ! Ultra moderne solitude : chanson

Dans cette fourmilière humaine, nous courons en tous sens, perdus, sous un masque social qui nous empêche de parler. Les signes de vie disparaissent sous des gestes mécaniques, normalisés. Le soir, nous rentrons, souvent seuls, dans nos espaces cloisonnés, de plus en plus hermétiquement fermés. Robots humains stockés en alvéoles.

Comment arriver à nouer des relations interpersonnelles quand nous avons peur de l’autre et que nous nous en tenons éloignés?

Nous croyons être ouverts mais en réalité, nous sommes bloqués, enfermés, nous appartenons à des clans à géométrie variable, rarement poreux. Nous scindons bien l’appartenance à chacun de ces groupes : la famille, les collègues, le club de gym, les enfants, les ados, les jeunes, celui du troisième âge plus tard,  etc ; chacun son groupe. Surtout pas de mélange ! Nous ne comprenons pas l’autre et n’avons ni le temps ni l’envie de le connaître. Nous créons une nouvelle forme de ségrégation sociale qui nous isole insidieusement.

Même si nous ne l’avouons pas, la solitude nous pèse. Nous essayons de la rompre par n’importe quel moyen. Internet nous donne l’impression d’avoir des relations, des amis, mais ce ne sont que des « amitiés » virtuelles et nous ne pouvons nier que la réalité tangible manque. Je crois qu’inconsciemment nous regrettons les lieux de rencontre d’autrefois : le perron de l’église, la place du marché, la  fête municipale, le bal des pompiers…

Ce que j’évoque ici  relève plus de l’isolement que de la solitude. Le sentiment semble le même, mais l’isolement est une sensation actuelle, propre au monde contemporain, (adieu la famille traditionnelle, le clan ou la tribu), alors que la solitude est inhérente à la condition humaine : on naît et on meurt seul.

On vit les uns avec les autres. Version originale Fabienne Thibault

Trois insertions de chansons pas vraiment gaies mais que j’aime beaucoup. Vous pouvez les écouter en lisant.

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