La Réunion a brûlé

Une deuxième billet pour le 2 novembre 2011. Avez-vous du temps pour lire ? Voulez-vous en savoir un peu plus sur l’incendie ? Je vous propose de lire un mélange d’articles : le Journal de l’Ile offre, en plus de sa version papier, une version internet résumée sous le nom de Clicanoo que je recommande à ceux qui veulent avoir des nouvelles de l’île.

Je numérote les articles pour plus de clarté et je corrige les deux plus grosses fautes en rouge (déformation professionnelle).

1 –  L’incendie est contenu désormais dans 2 834 hectares. Depuis trois jours, le vent a cessé et a donné du répit aux hommes qui ont pu gagner du terrain sur le feu. Sur le secteur du piton des Orangers, une sécurisation du site a été effectuée par les sapeurs pompiers et des hélicoptères bombardiers d’eau. Sur le front est, la reconnaissance ne fait état d’aucun point chaud. La réalisation de la piste destinée à protéger le rempart et à faciliter les opérations d’extinction dans cette zone est en voie d’achèvement. Au sud, les sapeurs-pompiers poursuivent les opérations de sécurisation des lisières mais de nombreux points chauds témoignent de sources de chaleur en sous-sol. Là aussi des travaux forestiers et d’aménagement de pistes sont en cours d’exécution.  Sur le secteur ouest, de nombreuses fumerolles ont été repérées sur la ligne des 1500 mètres. Les 171 renforts arrivés hier matin ont été affectés à ce front. Les reprises de feu ont été maîtrisées au niveau du chemin Timour. Les sapeurs pompiers assurent toujours la protection des habitations et bâtiments agricoles potentiellement menacés. La création en cours de voies pénétrantes à l’aide de moyens de génie civil permet l’attaque du feu au cœur de la zone. 1 108 personnes ont été mobilisées hier sur le sinistre. Les autorités sont optimistes pour la suite des opérations.

171 personnels en renfort
Hier matin, à 7 heures, le préfet Michel Lalande a accueilli 171 personnels supplémentaires spécialistes feux de forêt envoyés dans l’île par le gouvernement. Ces hommes proviennent de 33 départements de France. Parmi ces 171 personnels, on compte 3 experts en transmissions, 3 experts en logistique, 2 médecins, 2 infirmiers et 1 pharmacien et 160 soldats du feu ou officiers pour les postes de commandement. La plupart de ces hommes sont formés aux techniques de commando et possèdent une technicité pour endiguer les feux de forêts. Avec ce nouveau contingent, le nombre d’hommes arrivés en renfort de métropole est porté à 400.

Mon commentaire : merci à ces hommes volontaires qui font un métier dangereux et épuisant.

2Bello gagne la guerre du feu, deux ministres carbonisés, le préfet éreinté.
Jamais, le ou les incendiaires qui ont mis le feu à la forêt du Maïdo n’avaient imaginé, même avec la plus grande perversité, qu’ils allaient déclencher un tel incendie : une crise politique reprise en main au plus haut niveau de l’Etat.
La révolte contre le préfet menée par Huguette Bello et plusieurs élus a fini par obtenir l’arrivée de deux Dash 8. Cette fronde a été appuyée par les images diffusées en boucle ce dimanche sur les chaînes de télé nationales et la vive émotion d’une partie de l’opinion publique relayée via les réseaux sociaux. Contre l’avis de ses propres experts de la sécurité civile qui ne cessaient de répéter que l’avion bombardier aurait une utilité limitée, Claude Guéant a fini par trancher. À six mois de la présidentielle, Nicolas Sarkozy ne pouvait pas se permettre de se mettre à dos tout un département, de laisser croire que l’Etat laissait brûler par souci d’économie un site couronné par l’Unesco et, finalement, donner raison à tous ceux qui ont le sentiment que l’Outre-mer appartient à une sous-France. Les responsables de la sécurité civile vont donc devoir manger leurs casques et leurs képis. Car cette décision est en totale contradiction avec leur choix d’envoyer des renforts exceptionnels – 500 personnels – de métropole et de tout miser sur la lutte au sol. Avec cette décision, c’est donc une ministre totalement discréditée qui arrive aujourd’hui dans notre département. Trois heures avant la décision de Claude Guéant, la ministre de l’Outre-mer Marie-Luce Penchard expliquait que “le Dash 8 n’est pas forcément le bon moyen pour apporter une réponse à ce type de feu”. Et qu’il fallait faire confiance “aux hommes qui ont l’habitude de traiter ce genre de situation”. La ministre a eu tout faux.
Le député PS guadeloupéen Victorien Lurel ne s’est pas privé de railler cette ministre qui était en vacances aux Antilles durant ces événements. Du coup, on ne voit plus très bien à quoi va servir le voyage de Marie-Luce Penchard. Pas la peine en effet de venir “rassurer les Réunionnais” et expliquer que l’Etat mettait en œuvre des moyens considérables. Son ministre de tutelle l’a fait pour elle. Autre membre du gouvernement carbonisé dans l’histoire : Nathalie Kosciusko-Morizet. Tout en parlant de “désastre écologique”, la ministre de l’Ecologie a répété elle aussi que les Dash étaient inadaptés à la Réunion. À l’inverse, l’arrivée des Dash constitue incontestablement une victoire pour la députée-maire de Saint-Paul, les élus PS-PCR – et plus étonnamment l’UMP Jean-Claude Lacouture-, dont l’histoire retiendra qu’ils ont appelé Nicolas Sarkozy au secours dans une lettre. Symbole de cette révolte des gens de terrain contre les experts parisiens, Huguette Bello avec son énergie, sa fougue de pasionaria, et ses phrases cinglantes, elle aura réussi à faire plier le ministre de l’Intérieur. Une victoire dont sont exclus les responsables de la Région et du Département, Didier Robert et Nassimah Dindar, qui sont restés prudemment en retrait dans cette révolte contre l’Etat en estimant que le temps n’était pas à la polémique. Quant au préfet, il ressort évidemment éreinté de cette épreuve. Son ministère lui a dit : “Pas de Dash”. Alors jusqu’au bout, il a maintenu ce discours : “Le Dash n’est pas le médicament adapté”. Après avoir porté la bonne parole, le préfet a été lâché par son ministre de tutelle. Nul doute qu’il servira de fusible. Les risques du métier puisque les représentants de l’Etat sont rémunérés pour être aux ordres de Paris.
Face à tous ceux qui sonnent l’hallali, Michel Lalande doit méditer avec amertume cette phrase de Clemenceau : “La guerre est une affaire trop sérieuse pour être confiée à des militaires”. Si tactiquement, en matière de lutte contre le feu, les experts de la sécurité civile sont convaincus d’avoir raison, ils se sont lourdement trompés d’un point de vue politique.  Jérôme Talpin

Mon commentaire :

* Huguette Bello est députée-maire de Saint-Paul, qui est la plus grosse commune de l’Ouest de la Réunion et l’une des plus grandes communes de France. Huguette est membre du PCR, «filiale» du PCF dirigé par le clan Vergès. Personnellement, malgré certains reproches que je peux lui faire, je pense que Madame Bello est une femme bien qui mérite le respect. Je suis quelquefois naïve, je sais. Il n’empêche qu’elle, au moins, elle agit.

* Marie-Luce Penchard, quant à elle, devrait rester chez elle, en vacances. Pourquoi vient-elle ? Nous rappeler qu’elle est vivante ? Dilapider l’argent public ? De toutes façons, elle l’a clairement dit, à ses yeux, il n’y a que les Antilles et surtout la Guadeloupe qui valent la peine. Je n’ai pas oublié. Les autres Réunionnais non plus, j’espère. C’est la reine du dérapage. Pourquoi la laisse-t-on en place ? Fille de Lucette Michaux-Chevry… On n’est pas responsable des turpitudes de ses parents, mais ne dit-on pas que “les chiens ne font pas des chats” et que “le fruit ne tombe jamais loin du tronc” ou quelque chose comme ça. Je vous rappelle quelques condamnations pour faits “honnêtes” de maman : 20.000 euros d’amende pour “favoritisme” dans l’attribution de marchés publics, relaxe des poursuites de détournements de fonds, une peine de 12 à 15 mois d’emprisonnement avec sursis seulement… Je rappelle que Marie-Luce avait fait un discours bien senti dans lequel elle déclarait vouloir obtenir le maximum pour la Guadeloupe, seulement pour la Guadeloupe et que les autres départements ultramarins (dont elle est cependant également la ministre !) ne l’intéressaient absolument pas. C’est absolument scandaleux: il s’agit de clientélisme quasi tribal, non ? En créole réunionnais, j’ai envie de lui dire “Ma fille, reste out case. Nou la pas besoin voir a ou.”

3 – La Réunion peut perdre son label Unesco
Luc Gigor, un scientifique ayant étudié la faune et la flore réunionnaise, s’exprimait lundi sur Europe 1, expliquant que l’Unesco avait la possibilité de retirer son label.
Extraits.
“Il est étonnant de voir que l’État et les partenaires n’aient pas été capables de réagir plus rapidement cette année. Car là, ça commence à atteindre, des types d’habitat et des types de forêts qui n’avaient pas été atteints l’année dernière. Ce sont des forêts humides avec énormément d’espèces d’insectes, beaucoup d’oiseaux, des arbres assez grands. L’année dernière, on a considéré que c’était une catastrophe. Là, je ne sais pas quel mot il faudrait utiliser. C’est vraiment beaucoup plus grave. Le gros enjeu, c’est la perte du label de l’Unesco. Si un label n’arrive pas à gérer deux années de suite un événement comme des incendies de cette ampleur, c’est clair qu’il va y avoir une sanction des autorités compétentes. L’Unesco va dire : vous n’avez pas mis les moyens par rapport aux enjeux. Ça va être assez sévèrement jugé.”

4 – N’en déplaise à la préfecture, la mobilisation de la population mêlée à la pression des élus a très certainement accéléré la venue de deux Dash 8, opérationnels très prochainement pour tremper le Maïdo. Un revirement de situation qui réjouit les équipes sur place.

Hier matin, poste de commandement du Guillaume. Le Dash 8 est sur toutes les lèvres. La Réunion s’est réveillée en apprenant cette heureuse nouvelle : le départ imminent de deux bombardiers d’eau pour l’océan Indien. Finalement, la forte mobilisation, exprimée au-delà du département, a fini par payer, même si le ministère de l’Intérieur affirme “assumer totalement ses choix”. La pression devenait quasi intenable pour Michel Lalande. Il a dû affronter depuis le début du sinistre une contestation croissante. Sujet d’une simple motion en conseil municipal de Saint-Paul, le désastre écologique du Maïdo a notamment fait la Une du quotidien national Libération, pas plus tard qu’hier, avec ce titre évocateur “La Réunion sous le feu”. Entre-temps, les réseaux sociaux s’étaient emparés de l’affaire. Lundi soir à 23 heures, Huguette Bello a donc vu le résultat d’une fronde entamée le lendemain des premières flammes, mercredi dernier. “Tous les partis de gauche au niveau national se sont élevés. L’action menée par les élus de tous bords a été l’élément déclencheur, se félicite-t-elle. C’est un grand soulagement pour tous et notamment pour les pompiers qui commençaient à trouver que la tâche devenait mission impossible. Vous savez, ils ont des temps de repos très court”.
“L’Etat, troisième responsable du sinistre”
Elle réaffirme la légitimité de sa requête, “raisonnable depuis le début” : “On a été les témoins de ce qui s’est passé l’an dernier. Pour sauver le Maïdo, il faut des moyens extrêmes, c’est tout. On n’a rien demandé d’exceptionnel, on a juste demandé des outils appropriés”. Son regret : que le gouvernement ait tant trépigné à choisir ce cap. Sans concession, comme à l’accoutumée, elle juge l’Etat responsable en partie des dégâts, “en troisième position, après le pyromane et les vents violents”. Autant de griefs qu’elle n’adresse pas directement à Michel Lalande, qui d’ailleurs ne s’est pas rendu sur site hier matin… “Dès le premier jour, il a pris ses responsabilités, mais c’est un fonctionnaire qui obéit. Il a fait son possible”, reconnaît la députée-maire de Saint-Paul. Le ton est nettement plus sec à l’égard de la ministre de l’Outre-Mer, Marie-Luce Penchard : “Son seul exploit, c’est d’avoir fermé sa page Facebook car il y apparaissait trop de contestations”.
“L’an dernier, ce n’est pas le Dash qui a éteint le feu”
En l’absence du préfet et du sous-préfet, le porte-parole de la sécurité civile s’est retrouvé seul en première ligne pour évoquer cette volte-face. Et notamment soutenir que la décision a vu le jour indépendamment d’une pression quelconque. “C’est un élément supplémentaire qui va être inséré dans le dispositif”, a simplement répondu Florent Hivert, mettant en avant le schéma avancé par le préfet depuis le début : attendre de contenir les flammes avant d’appeler le Dash. “Il ne faut pas se leurrer, il n’est pas l’outil miracle que certains voient dans cet avion. Je voudrais d’ailleurs rappeler que l’an dernier, ce n’est pas lui qui a éteint l’incendie”. Le lieutenant-colonel Eric Grohin, débarqué depuis quelques heures à peine, et dont la mission est de “fixer” le feu sur le front ouest, enfonce le clou. “Dans ce genre de configuration, c’est d’abord des hommes à pied, des commandos qui vont stabiliser le feu. Il faut bien comprendre que l’aérologie et le relief ne nous permettent pas de l’éteindre. Les avions ne sont que des appuis”, assure le spécialiste des feux de forêt dans le Var, à la tête d’un détachement de 170 effectifs. Mais cette polémique appartient désormais au passé et ne doit surtout pas masquer l’aide considérable dont vont bénéficier les soldats du feu dès demain. À l’unanimité, ils saluent la venue de ces deux engins. À coups de 12 tonnes d’eau, les Dash vont considérablement les soulager. Certaines équipes pourront même aller se reposer.

Les pompiers vont enfin se reposer. Merci encore à eux. Et les oiseaux grillés, les arbres brûlés, sciés, les Réunionnais démoralisés, ils font quoi ? Qui pense à eux ? `

Et si l’UNESCO supprime le label ?

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8 réflexions sur « La Réunion a brûlé »

  1. un ou plusieurs inconscients, comme souvent le vent qui comme par hasard se met de la partie, à contrario la pluie qui joue les absentes, et on se retrouve avec des hectares brulés !
    lorsqu’ on est sur place, on se rend compte que les tonnes d’ eau déversées par un avion ou un hélico, sont vraiment peu de chose face aux étendues concernées !
    Alors, il est sur que c’ est tous les moyens qu’ il faut mettre en oeuvre

  2. Les incendies de forêt, surtout là où la nature n’est pas adaptée comme c’est le cas dans certaine régions de l’Amérique ou d’autre partie du monde, font des dégats considérables.
    Je vois cela en Italie dans ma région des Abruzzes ou pratiquement il ne se passe plus une année sans qu’il y ait plusiers centaines voir des milliers d’hectares brulés.
    Autrefois c’était assez rare s’agissant essentiellement de feux accidentel provoqués par la foudre, mais maintenant se sont les incendiaires qui sévissent.
    L’incendie éteint, un spectacle de désolation s’offre à nos yeux et il faudra des années à la nature pour tout réparer
    Bonne chance à la Réunion
    Antonio

  3. Merci Françoise pour toutes les informations reçues ! Il n’y a pas assez de catastrophes naturelles ? faut-il en rajouter !
    A bientôt

  4. Allez ! Un lien vers le blog de Pierrot Dupuy qui reprend tes propos concernant Marie Luce Penchard.
    Comme je te le disais, s’il y a bien un ministre inutile en ce moment, c’est elle ! Jego n’était pas si mal malgré les critiques qu’on a pu lui faire !

  5. Ping : La Glacière | FrancoiseGomarin.fr

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