C’est pas faux

“C’est pas faux” est une litote encore plus connue depuis Kaamelott. Ce n’est pas très correct grammaticalement, nous devrions dire “ce n’est pas faux”, mais tout le monde comprend que “c’est pas faux” équivaut à “je suis d’accord avec vous”. Et pourtant, cette expression cache quelque chose :  une botte secrète. 

La grammaire, l’orthographe, ça se perd, comme la culture générale. Au fait, la culture générale, qu’est-ce que c’est ? Un truc qui disparaît, c’est sûr. C’est la somme des connaissances en tous genres d’un individu, sans spécialisation, ce qui faisait l’honnête homme du XVII° siècle et dont on s’est beaucoup moqué en disant comme Françoise Sagan : “la culture, c’est comme la confiture, moins on en a plus on l’étale”.

La culture de l’honnête homme était étendue et propre à le rendre agréable en société. Homme de cour et homme du monde, il se montrait humble, courtois et s’adaptait à son entourage. L’honnête homme était un généraliste (ce qui suppose un savoir élargi) et s’opposait ainsi au spécialiste (celui qui s’enferme dans un savoir unique, devient stupide).

Cet idéal d’humanité a perduré jusqu’au milieu du XX° siècle. En 1947, l’historien français Philippe Ariès pouvait encore écrire que l’honnête homme représente “non pas un intellectuel professionnel, mais un esprit curieux, cultivé, de goût sûr”.

Aujourd’hui, nous avons des spécialistes en tout et des diplômes idoines : CAP, BEP de technicien de surface, CAP/BEP en maintenance et hygiène des locaux ; pour des Mastères Spécialisés, rien qu’en énergie, on peut trouver : alternatives pour l’énergie du futur, énergies renouvelables, ingénierie et gestion du gaz, ingénierie des véhicules électriques, optimisation des systèmes énergétiques… C’est dire si nous avons des gens très compétents. Pourquoi donc tout va-t-il de plus en plus mal avec tant de spécialistes ?

Parce qu’ils sont, croit-on, trop spécialisés. Cette spécialisation qui cache, pour certains, sous une langue de bois et une suffisance certaine, de nombreuses insuffisances.

Pour en venir à ce « c’est pas faux » qui est à l’origine de ce billet, il faut que je vous raconte. Perceval est l’un des principaux personnages de la série télévisée Kaamelott.

Particulièrement naïf et stupide, Perceval fait référence, de manière parodique, à son légendaire homonyme, chevalier de la Table ronde originaire du Pays de Galles. Il ne sait ni lire ni écrire et a un vocabulaire assez limité. Il perd rapidement le fil de la conversation dès que l’on utilise des mots trop compliqués, ce qu’il tente désespérément de cacher (avec la botte secrète que Karadoc lui a apprise : « C’est pas faux »). Il se mélange souvent dans tous les termes un peu soutenus ou les expressions imagées, rendant son discours plutôt difficile à suivre et exaspérant pour ses interlocuteurs, surtout pour Arthur qui est pourtant le seul à le comprendre dans ces moments difficiles.

 

Selon l’affirmation de Blaise Pascal “Il est bien plus beau de savoir quelque chose de tout que de savoir tout d’une chose. Cette universalité est la plus belle”. Mouais… Ça, c’était avant… Maintenant le saupoudrage, on connaît ; pour l’honnête homme du XXI° siècle, c’est devenu « savoir rien sur presque tout ». Les “ladi, lafé”, les potins, les histoires de “pipoles” ont de beaux jours devant eux.

 

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3 réflexions sur « C’est pas faux »

  1. C’est pas faux, chère Françoise. Je constate comme vous qu’il y a de nombreux spécialistes et une compartimentation des métiers, en outre entre culture humaniste et culture scientifique, lesquelles se sont accompagnées de la compartimentation entre les différentes sciences et disciplines. Le dialogue des compétences, est malheureusement absent dans nos sociétés acquises au capitalisme libéral, car on constate une régression démocratique, une expansion de l’autorité des experts, spécialistes de tous ordres, qui rétrécit d’autant la compétence des citoyens, condamnés à l’acceptation aveugle de décisions émanant de ceux qui sont censés savoir, mais en fait, pratiquent une intelligence parcellaire et abstraite qui brise la globalité et la contextualité des problèmes. Le développement d’une démocratie cognitive n’est possible que dans le cadre d’une réorganisation du savoir, qui appelle une réforme de pensée qui permettrait non seulement de séparer pour connaître, mais de relier ce qui est séparé. Il s’agit d’une réforme paradigmatique, qui concerne notre aptitude à organiser la connaissance, et tout çà “c’est pas faux” ! Bonne journée à vous. Phil

  2. il y a donc eu un temps où la culture était un savoir vivre !
    J’ aime bien la définition d’ édouard Herriot , la culture, c’ est ce qui reste quand on a tout oublié !
    Mon fils a toute la série des Kaamelott !
    Passe une bonne journée Françoise
    Bisous

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