Les ponts de Paris (24)

Retour à PARIS. Le Pont Royal reste, avec le Pont-Neuf et le pont Marie, l’un des trois plus vieux ponts de Paris. C’est le seul qui n’est pas dans l’axe d’une rue, ni d’une perspective particulière. En effet, en rive droite, le pont bute sur le pavillon de Flore et n’atteint l’avenue du Général Lemonnier qu’après un trajet en chicane ; il en est de même sur la rive gauche avec les rues du Bac et de Beaune.

Regardez donc le plan. Un créole dirait “le somin lé tord” (la route n’est pas droite).

Autrefois, la liaison des deux rives de la Seine se faisait au moyen d’un bac, à l’origine du nom de la rue proche.

Pour plus de facilités, en 1632, un certain Barbier (mouais…) construisit un premier pont en bois, le pont Barbier, appelé aussi pont Sainte-Anne et plus populairement pont Rouge en raison de sa couleur.

Ce pont de bois était réservé aux piétons et aux cavaliers, qui payaient, comme chaque passant y compris les animaux, un double au péage, la même chose que sur le pont au Double et sur beaucoup d’autres ponts. (On est revenu à ce genre de taxes.) Il parait qu’un passant trouvant le péage abusif, passa par le fil de son épée le percepteur  trop exigeant (aujourd’hui, coup de revolver, de couteau… à celui qui contrôle, protège, dérange ; finalement, rien ne change).

En 1642, le pont fut coupé par les eaux, reconstruit en 1651, incendié en 1654, emporté en 1656, refait en 1660, de nouveau emporté par la crue de 1684. Madame de Sévigné rapporte cette dernière inondation ; dans la nuit du 28 au 29 février le pont perd huit de ses quinze arches : “Le Pont Rouge (…) est parti pour Saint-Cloud, et n’a point soutenu la fureur des débâclements qui ont tout ravagé. Jamais il ne s’est vu un hiver si terrible (…)”  Louis XIV décide alors de faire construire entièrement à ses frais un pont de pierre, plus solide, plus fiable, qu’il appellera Pont Royal.

C’est Jules Hardouin-Mansart qui établit les plans. Le pont fut édifié entre le 25 octobre 1685 et le 13 juin 1689. Sur ce pont en dos d’âne accentué, eurent lieu de grandes fêtes, en particulier, le mariage mémorable (et par procuration) en août 1739 d’Elisabeth de France (fille de Louis XV, âgée de 12 ans) et de l’Infant d’Espagne, mariage qui attira plus de 500 000 personnes sur les berges et sur le pont lors des fêtes nautiques données à cette occasion.

Le pont Royal est, outre les fêtes de mariage, le témoin de nombreux faits historiques. J’ ai envie de   rappeler le 11 juillet 1791, le jour où le cortège des cendres de Voltaire, tiré par 12 chevaux blancs, l’emprunte pour se rendre au Panthéon (église Sainte-Geneviève). Le hasard est-il seul responsable de l’installation, face à Voltaire,  de Rousseau, le  11 octobre 1794 ? Un hasard facétieux qui voulait que nos deux “grands hommes” continuent leurs discussions, car ils ne s’aimaient guère ces deux-là  Moi je préfère Voltaire. J’y reviendrai un autre jour.

De 1792 à 1804, le Pont Royal devient  Pont National ; de 1804 à 1814, Pont des Tuileries. C’est sur ce pont que Bonaparte fit disposer des canons qui devaient assurer la défense des Tuileries où siégeaient alors la Convention et le Comité de Salut Public.

Le roi Louis-Philippe y fut par deux fois victime d’un attentat, le 19 novembre 1832 puis le 27 décembre 1836, mais chaque fois en sortit indemne. Ce jour de décembre, c’était le quatrième des six attentats dont il fut l’objet. Le roi se rendait des Tuileries au Palais Bourbon à l’occasion de l’ouverture de la session parlementaire, un homme du nom de Meunier fit feu sur le cortège à l’aide d’un pistolet. La balle brisa une glace dont les éclats blessèrent légèrement les trois fils de Louis-Philippe. Le roi est sain et sauf. Agé de 22 ans, le terroriste est condamné à mort. Bon prince et surtout bon politique, le Roi des Français le gracie, le fait exiler en Amérique… Mieux, il lui fait remettre un petit pécule pour faciliter son installation à l’étranger.  Le pont a été élargi et abaissé, pour supprimer le dos d’âne, de 1839 à 1844, mais c’est l’un des ponts anciens de Paris qui a le mieux conservé son aspect d’origine. L’ouvrage est maintenant composé de cinq arches en plein cintre qui mesurent respectivement 20, 22, 23, 22, et 20mètres. Sa longueur est de 133 m, et sa largeur de 16 m.Une échelle hydrographique qui indique le niveau des plus grandes crues parisiennes est visible sur la dernière pile de chaque rive.

En 1939, il a été classé monument historique  au même titre que le pont Neuf et le pont Marie.

Un autre point de vue sur le pont , photo empruntée au site http://fr.structurae.de/photo

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6 réflexions sur « Les ponts de Paris (24) »

  1. Chère Françoise,
    Encore un pont chargé d’histoire ! Il faudrait être une encyclopédie pour retenir tous ces évènements.
    J’adhère à ce que tu dis par rapport au “bon sens”, mais je me permets de te demander pourquoi tu mets ça à la fin de ton article, je n’ai pas compris.
    Je te souhaite un bon samedi et t’embrasse bien amicalement.

  2. Merci Clara , il n’y avait aucune raison que ces lignes soient là. Je viens de les enlever.
    Merci, merci, merci.
    Comme je suis fatiguée et que j’écris dans la nuit, je m’endors un peu sur le clavier. C’était pour une prochaine publication, quelques mots relevés qui allaient évoluer…
    Merci encore et bonne journée.

  3. Encore une très belle promenade dans PARIS et son histoire … Quelle documentation ! C’est un vrai plaisir de “découvrir” des endroits, des ponts, des rues qu’on emprunte tous les jours quand on est parisien, mais qu’on ne connaît pas ou trop imparfaitement !
    Merci pour ce plaisir et bonne journée.

  4. c’ est grâce à toi que je vois qu’ un pont peut être un témoin de l’ histoire !
    ceux de Paris mériteraient de se retrouver dans ” historia ” !
    Comme toi, je préfère Voltaire à rousseau !
    J’ ai dans l’ idée, Voltaire aurait fort à faire dans l’ ambiance délétère de notre siècle !
    bonne journée
    bisous

  5. que de bonnes explications
    Mes enfants sont repartis en Alsace hier.
    je vais mettre un nouvel article lundi ,car je dois maintenant remettre ma maison en ordre
    j’ai 78ans,voilà mon âge
    bon week-end et gros bisous
    au plaisir de te lire
    janine

  6. Coucou de retour, je suis passée te voir, quelle belle série l’histoire de ces ponts et bienvenue à Morgane heureuse grand-mère…Bon dimanche et bisous

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