Le mensonge est la religion des esclaves et des patrons. (Maxime Gorki, Les bas-fonds, IV, 1, Satine ).
Je ne suis pas patron et je ne veux pas être esclave. Je rêve de vérité et surtout d’honnêteté. Ce matin, une fois de plus, je suis révoltée. J’aimerais tant être d’humeur égale mais je n’y arrive pas. J’avais prévu ce qui se passe, je ne devrais pas être surprise, il n’empêche que ça me révolte. Comme le film chinois, mon histoire n’est peut-être pas claire pour vous et pourtant, c’est simple.
Je l’ai déjà dit, je suis fille posthume, c’est dire si mon histoire commence bien. Je passe les détails mais quand j’entends la chanson «Chienne de vie», je souris.
Alors pour que tout semble aller bien, je ris, je chante, ça aide. Avant, jeune, je «frimais», je toisais le monde partant du principe qu’il vaut mieux faire envie que pitié. Orgueil, disait ma mère ; je répondais : fierté espagnole, à moitié andalouse de surcroît. Je crois que ce qui la contrariait c’est que je ne me taisais pas, que je réclamais le droit à la vérité et au respect. J’ai bien fait de redresser la tête, de regimber, j’ai réussi à avoir une vie différente de celle que l’on voulait me fabriquer.
Maintenant, ma mère est morte (depuis plus de trois ans) et je pensais pouvoir récupérer le livret de famille de mes parents (je suis fille posthume et unique), leurs photos de mariage et d’autres souvenirs de ma famille paternelle (encore des photos), ainsi que la bague de fiançailles (même pas en or, comme s’était plu à le répéter ma charmante mère) mais je n’ai rien pu avoir. Ce n’est pas grave, je m’y attendais mais ce matin, une lettre du notaire chargé de la succession à laquelle je ne suis pas intégrée (ma mère ayant tout légué à ses deux enfants Isabelle et Michel ; je m’appelle Françoise, vous le savez), rapporte des faits mensongers et incohérents, là encore je passe les détails mais le plus beau c’est ça : «il (mon beau-père, le second mari de ma mère) m’indique que la bague de fiançailles n’a pas été retrouvée. Il m’indique pour information que son épouse avait donné à votre cliente un bijou de famille très ancien, ainsi qu’une bague de valeur qu’il avait lui-même offert à son épouse.» C’est ce dernier cadeau qui a failli me faire étouffer. INSENSÉ ! Comment une mère qui garde tout pour elle en disant «c’est à moi», de la bague de fiançailles aux photos de son mari quand il était enfant, des neveux et nièces (mes cousins), en passant par le livret de famille, comment cette mère aurait-elle donné une bague offerte par son deuxième époux ? Mensonge éhonté !
Je passe le reste. Je m’en moque mais ça, c’est me refuser le droit aux racines. Ma mère et son mari ont jeté la valise militaire de mon père qui fut soldat dans la 2° D.B. de Leclerc, ça encombrait leur cave. Disparus aussi son étui à cigarettes, son jeu de cartes, les petites choses qu’il avait laissées. Rien, je n’ai rien. J’ai vécu sans pendant près de soixante ans, je m’en passerai encore mais voir jusqu’où la méchanceté et la mesquinerie peuvent aller, j’ai du mal à l’accepter. L’imaginer, oui, je ne suis pas gentille, paraît-il, mais le constater, je suis indignée.
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