La peur

Quand je vous ai annoncé que j’étais présidente de la communauté «Musiques à cœur… ouvert», je vous ai encouragé à vous exprimer et j’ai  rappelé que « la France a peur le soir à vingt heures » (Roger Gicquel ou Mickey 3D), mais il faut bien prendre conscience que la peur est là, en permanence, chez bon nombre de nos concitoyens.

La peur aujourd’hui a de nombreuses causes.

Depuis Fukushima, la crainte du nucléaire s’est réveillée ; une grande majorité de Français a de bonnes raisons d’avoir peur, une peur vraiment légitime liée au vieillissement des cinquante-huit (58)  réacteurs nucléaires, pas aussi sûrs qu’on voudrait nous le faire croire.

Par ailleurs, le tsunami de Fukushima vécu  en direct à la télévision, passé  et repassé sur les écrans, et celui de 2004 en  Indonésie nous ont rappelé que la nature est la plus forte.

Il fut un temps où la maladie angoissait nos concitoyens, le cancer en particulier puis il y a eu le Sida. Certains ont voulu nous effrayer davantage avec des grippes aviaires ou H1N1 (ça n’a pas marché). Il y a la crainte d’une attaque terroriste (ça continue d’ailleurs) mais, cet hiver 2012, alors que la crise fait des ravages en Europe, la pauvreté est la vedette des peurs. Il suffit d’évoquer ce sujet pour réaliser que n’importe lequel d’entre nous se sent concerné. Qui n’a pas un fils, un mari, un ami, un membre de sa famille au chômage ?

Ils sont 3,5 millions sans emploi en France (officiellement, la réalité est pire si on considère que les temps partiels imposés sont du chômage déguisé). Il y a à peu près 3,5 millions de mal-logés (pas forcément les chômeurs) et 800 000 personnes qui ont recours à l’aide alimentaire. Plus de 8,5 millions de Français vivant avec moins de 964 euros par mois. Nous avons donc peur de ne plus réussir à maintenir notre niveau de vie et de faire partie, un jour (bientôt ?), des nouveaux pauvres, mis à l’écart quoi qu’on dise. Nous avons peur du rejet social, de la solitude.

Quelle société étrange où l’on parle sans cesse de communication, de solidarité, d’égalité mais dans laquelle on n’ose plus ni sourire ni se parler, on communique en s’adressant à un mur (Face Book), on détourne le regard de celui qui est différent, on se protège en s’isolant avec des écouteurs, on réclame de la sécurité mais on ne réagit pas devant une agression par peur des représailles…

Il existe une autre peur, une peur dont on parle peu ou dont on ne prend pas véritablement conscience, une peur qui atteint un grand nombre de personnes, peut-être la plus grande peur d’aujourd’hui :  la peur du silence.

Le silence est si redouté qu’on laisse la télévision allumée pour avoir un bruit de fond, qu’on met de la musique partout, dans les magasins, les ascenseurs, et qu’on préfère presque n’importe quel bruit, n’importe quelle parole pour effacer l’angoisse de l’isolement. Isolement, mort, néant… est-ce la peur du vide ?

Est-ce pour cette raison que la télévision nous offre des programmes de plus en plus stupides, pour que n’importe qui se sente quelqu’un ?  Andy Warhol avait-il si bien vu l’avenir ?  Le «quart d’heure de célébrité» (« fifteen minutes of fame ») expression créée par  Warhol, désigne la célébrité fugace de ceux qui sont l’objet, un temps, de l’attention des médias de masse. Miroir aux alouettes…Dégâts conséquents (au sens premier : qui suit de manière logique). Douloureux retour à la réalité.

La peur du vide, on meuble.

Est-ce pour cette raison que, de plus en plus, on parle pour ne rien dire ?

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