Ah les paroles…

Assez souvent, je vous fais des promesses «j’en reparlerai» ou «j’y reviendrai». J’essaie de tenir parole et en règle générale, je le fais. Je ne suis pas comme Alphonse Allais qui vantait sa mémoire en disant : «J’ai une mémoire admirable, j’oublie tout», moi je suis plutôt du genre «mule du pape» : j’ai bonne mémoire. Je ne suis pas rancunière (c’est pas beau) mais je n’oublie pas. Je sais que ça déplait à beaucoup ; au fait, pourquoi ? Auraient-ils mauvaise conscience ceux qui me font ce reproche ? C’en est presque rassurant.

C’est sans doute l’éducation que j’ai reçue de ma grand-mère qui me pousse à respecter la parole donnée. L’atavisme andalou aussi, peut-être ? La fréquentation de la communauté chinoise pendant plus de trente ans a certainement consolidé cette idée de respect de la promesse car, c’est bien sur cette base que fonctionnait la «banque chinoise», une sorte de tontine qui permettait aux membres de la communauté d’investir, de faire face à des dépenses. Je l’ai vu fonctionner. Ça disparaît ou ça a disparu, les jeunes générations n’ayant pas reçu la même éducation et vécu les mêmes difficultés pour vivre ou même survivre. En résumé, à mes yeux la parole donnée vaut acte écrit. Moquez-vous, je m’en fous. Je suis naïve. Et alors ? C’est avec des naïfs, des rêveurs, des idéalistes que le monde arrive de temps en temps à changer.

Tous les requins, voleurs, magouilleurs, arnaqueurs, menteurs, imposteurs, bluffeurs, escrocs, filous finiront bien par «payer». On ne croira plus sur parole «leurs belles idées» (des promesses illusoires). Dans ces temps futurs, il faudra être (homme… ou femme) de parole (tenir ses promesses, ses engagements). Ma parole, ces temps viendront ! («Ma parole» exprime l’étonnement, l’indignation, atteste la vérité de ce qu’on dit, voir «la Vérité si je mens», c’est une ellipse pour ma «parole d’honneur» (du temps où l’honneur existait).

Nous sommes, aujourd’hui (et surtout pas au jour d’aujourd’hui qui me hérisse le poil), dans une société de communication, on en parle, on parle, mais personne n’écoute l’autre, ne veut l’écouter. Nous parlons pour faire du bruit, montrer que nous sommes vivants, c’est tout. Les échanges vrais disparaissent : ils dérangent. On baratine.

Je crois que c’est depuis que les paroles se multiplient, depuis que n’importe qui peut “passer à la télé” (pour dire n’importe quoi), depuis un certain temps donc, que les mots se vident de leur sens. Paroles comme dans la chanson de Dalida…

En est-ce fini du sens des expressions plus ou moins anciennes telles que :
N’avoir qu’une parole, ne pas revenir sur ce qu’on a dit ou promis.
Porter, prêcher la bonne parole, prêcher l’Évangile ; endoctriner quelqu’un, un groupe.
Prendre la parole, action de commencer à parler, à exposer ses opinions. Attention au temps de parole, En politique, on invoque le droit de parole, droit reconnu à tout membre d’une assemblée parlementaire et aux représentants du gouvernement qui y ont accès de demander et d’obtenir la parole sous les seules réserves prévues par le règlement intérieur. C’est aussi le temps global déterminé, imparti à quelqu’un ou à un groupe pour une intervention orale. Le problème vient du fait que dans certains cas, il n’y a pas de temps imparti et les discours fleuves existent, plus ou moins soporifiques… Les périodes pré-électorales voient se multiplier les interventions longues, longues, longues.
Reprendre, dégager sa parole : se dédire, se rétracter. Quand on le fait clairement, officiellement, je considère que c’est courageux et honnête mais combien de coups en douce dans ce domaine ? Comment avoir confiance en l’autre ? Comment aujourd’hui le croire sur parole, sans autre garantie que la bonne foi de celui qui donne sa parole.

Tenir (sa) parole : respecter ses engagements, ses promesses, voilà qui semble bien démodé. Nous avons tous des exemples de promesses non tenues…Et pourtant, c’est bien en étant respectueux de sa parole qu’on rétablira la confiance et que nous arriverons tous à vivre mieux. Ne le croyez-vous pas ?

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10 réflexions sur « Ah les paroles… »

  1. Que de paroles pour parler de la parole dans tous ses états ! C’est très instructif (comme d’habitude).
    Tenir parole actuellement…est-ce normal ? Mes parents, tout comme votre grand-mère, m’ont appris qu’il fallait toujours tenir sa parole, question de conscience…Mais c’était l’époque où la conscience nous titillait parfois…je crois que ça fait démodé ! Nous venons d’entrer dans une ère de “normalité”…est-ce à dire que nous étions anormaux jusqu’à présent ? Ma parole, je n’en crois rien ! Paroles “en l’air”, promesses….Ne dit-on pas que les paroles s’envolent ?
    Je suis fatiguée, toutes ces paroles m’étourdissent …. Je crois bien que je vais aller voir du côté des histoires sans paroles….le sommeil et les rêves !
    Mais je me suis amusée à lire votre article ! merci et bises.

  2. Mes grand-parents, mes parents n’avaient qu’une parole et cette dernière avait plus de poids que des écrits sur du papier , mais les temps ont bien changé et ceux qui nous gouvernent ou veulent nous gouverner nous ont montré que les paroles n’ont plus de valeur .
    On dit maintenant que les promesses n’engagent plus que ceux qui les écoutent
    Incroyable , non!!
    Surtout ne change pas , tu es bien comme tu es;

    Douce journée, Françoise
    Bisous
    timilo

  3. si ! tu as tout a fait raison, tenir parole, rétablir la confiance, merci pour ton excellent article
    bonne journée bisous ,

  4. elles n’ont de valeur que dans l’instant où on les prononce.

  5. bonjour françoise j’espere que tu va bien merci pour ton gentil passage …. jolie article ha les paroles !!!!!!! le temps sur nice soleil ciel bleu mer belle a afgite pas mal de vent en ce moment chez nous je te souhaite un trés bon mardi a bientôt bises amicales michel003

  6. il n’ y a pas encore si longtemps, en France, on topait dans la main pour sceller un marché !
    Et il est vrai que dans le fouillis médiatique, c’ est l’ audience qui compte, et non plus la parole !
    Remarque, lorsqu’ on voit que même une signature n’ engage pas, on ne peut s’ étonner qu’ il en soit de même de mots !
    bonne journée
    bisous

  7. Ping : Moi, je (1) | FrancoiseGomarin.fr

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