Cafre La Réunion

Le 20 décembre à La Réunion, c’est la fête Caf’. J’y reviendrai demain, après-demain et le jour J aussi.

Le terme “cafre” est largement répandu dans l’île. Si son usage est courant, il traîne son lot d’ambiguïtés. Est-ce un terme raciste ? Non, il a un côté affectueux que l’on ne manque pas de faire connaître : «mon caf’»,  «mon ti’ caf’» ou «ma cafrine” et on l’attribue à un individu que l’on apprécie quelle que soit sa couleur. Malheureusement et historiquement, le mot “cafre” vient de l’arabe kafir qui signifie « infidèle » ou «impur», alors cafre peut être injurieux selon le ton utilisé et l’adjectif qualificatif qui lui est attribué : gros cafre par exemple, pire vilain cafre.

Cafre, c’est ainsi que les marchands d’esclaves arabes désignaient les autochtones des pays s’étendant du Mozambique à la région du Cap, en Afrique du Sud, des Africains, des noirs. Plus tard, les Européens ont repris le terme qui est devenu caffer en anglais, kafer en afrikaner et cafre en français, puis «caf’» en créole réunionnais.

Attention, un Réunionnais avec des traits négroïdes est un “gros cafre” et il existe une multitude de déclinaisons du mot, du «cafre salon» au «cafre rouge» en passant par le «cafre la soie». Je ne crois pas que ce soit raciste mais simplement une façon de définir plus précisément un individu. Ceci dit, ce n’est pas tout le temps dénué de moucatage (moquerie). Le moucatage est un sport réunionnais ; c’est gentil la plupart du temps, mais pas toujours.

A La Réunion, on a donc (liste non exhaustive) le «caf’ bleu» celui avec la peau très noire (noir comme un cul de marmite), le «caf’ clair» ou «cafre métis»  à la peau claire (appelé aussi «batard caf’» et même le «caf’ blanc» à la peau très claire. Il existe aussi un modèle dit «caf’ rouge» (celui qui m’a posé le plus de difficulté à identifier ; je me souviens d’une amie qui me parla, une première fois de son mari en disant «cafre rouge». J’ai demandé à le voir pour identification). Le «cafre rouge» a encore les cheveux crépus mais ils sont roux ou châtain brun et le cafre est alors : cafre rouge ou rose. Il y a enfin le «caf’ Malbar», en recherche d’identité, un métis tamoule-cafre, qui se dit cafre ou malbar  selon les circonstances. Avantages et inconvénients du métissage.

Ajout de 2016 : Caf’ la boue : homme de condition misérable et Caf’ la cendre (idem) : pauvre diable.

La départementalisation qui aurait dû amener une forme de fraternité et d’égalité a continué à créer une société qui se cherche, sans racisme apparent mais pleine d’incertitudes. Pas facile d’être français à dix mille kilomètres de la Mère-Patrie avec une couleur de peau qui n’est pas celle des Gaulois mais nous constituons un joli camaïeu de couleurs de peau. Au sein d’une même famille, d’une même fratrie, les couleurs sont multiples. Tout n’est pas… rose. Certains se vantent de leur peau plus blanche comme si la couleur claire donnait la supériorité.

Cette distinction est un résidu de la société coloniale, esclavagiste et tout simplement européenne. Combien de temps s’est-on posé la question «les Noirs ont-ils une âme ?» ? Et pourtant, les missionnaires les baptisaient comme ils l’avaient fait avec les Indiens d’Amérique. Ceci dit, les esclaves n’ont pas toujours été noirs. Les Romains et les Arabes avaient des esclaves européens.

Au XVIe siècle, les esclaves blancs “razziés” par les Arabes musulmans furent plus nombreux que les Africains déportés en Amérique. Le saviez-vous ?

De 1530 à 1780, quelques 1 250 000 chrétiens blancs devinrent esclaves dans des pays comme l’Algérie et la Lybie actuelles et autres pays islamiques. Ce chiffre dépasse considérablement les 800 000 Africains transportés aux États-Unis.

Les principaux bourreaux des Blancs furent donc des Arabes mahométans. Entre 1492 et 1830, environ deux millions d’Européens chrétiens furent réduits en esclavage par les Arabes dans toute l’Afrique du Nord, il n’en resta aucun survivant. En effet, le traitement infligé aux esclaves par les Arabes ne leur laissait guère plus de sept ans d’espérance de vie (un peu plus pour les femmes, tant qu’elles pouvaient assouvir les besoins sexuels de leurs maîtres). La traite des Blancs passait par la Méditerranée et des villages entiers du sud de l’Italie, de l’Espagne, de France, du Portugal, de la Grèce furent attaqués provoquant le dépeuplement de régions entières.

Ne l’oublions pas !

N’oublions pas non plus que les esclaves africains étaient souvent vendus à des Blancs par d’autres Noirs. Qui doit aujourd’hui faire repentance ?

Pas moi. Ma grand-mère maternelle a vécu une vie de quasi-esclave. Placée chez des patrons à l’âge de six ans par ses parents, pour garder des vaches, elle ne recevait aucun salaire et ne mangeait même pas à sa faim tous les jours. C’était à Saint-Michel-de-Maurienne dans les années 1900.

Désolée, Monsieur Hollande et tous les autres “bien pensants”, votre repentance est absurde. Ce n’est pas la France qui devrait se repentir, mais l’humanité toute entière.

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8 réflexions sur « Cafre La Réunion »

  1. Coucou Françoise

    Je viens te souhaiter un doux lundi et t’offrir ce lien
    pour Noël qui approche, en guise d’amitié, pour te remercier d’être
    une personne fidèle sur ob ou Ekla.

    http://lolli-love-creations.eklablog.com/

    Très bonne journée avec plein de tendresse.

    Je t’embrasse bien fort.

    Mariposa

  2. Un p’tit bonjour…
    j’ai eu overdose d’internet… mais je reviens m’instruire …
    Amitiés
    Jean

  3. il me semble qu’ un tel mot est raciste ou non, selon celui qui l’ utilise, et selon les circonstances !
    bonne journée
    bisous

  4. Salut Françoise
    voilà un sujet celui des repentances de tous ordres pour lequel je me bat depuis longtemps: au regard de l’histoire les massacres, les déportations, les esclavages ont été nombreux et tu en rappelle quelques uns.
    Alors de nos jours il ne s’agit point de le justifier mais de tirer les leçons et aller de l’avant: toute ces repentances ne sont qu’une façon de faire perdurer les haines. Et puis, comme tu le dis si bien, tous ceux qui exigent le repentir ne sont pas aussi blanc que neige. Et n’oublions pas qu’en Afrique du nord l’esclavage est toujours d’actualité.
    Belle semaine à toi.
    Amicalement
    Antonio

  5. Bonjour Françoise

    On partage de bonnes choses entre amis,
    c’est pour cela que je veux commencer cette
    journée avec toi.
    Je t’invite donc à conserver cette belle recette
    d’amitié pour la journée et plus.

    Que ta journée soit rayonnante.

    Un doux vent de bisous arrive par chez toi,
    ouvre ta fenêtre…

    Mariposa

  6. Ping : Proverbes (turc, chinois, français…) | FrancoiseGomarin.fr

  7. Intéressantes précisions. J’ai, comme la plupart des réunionnais un certain pourcentage de cafrité (caéfritude ?) dans mon ascendance, et plus te temps passe, plus je m’intéresse et je revendique ma part de négritude, les imbéciles sont si prompts à traiter de “noirs” les métis, comme Obama (50%) et à me traiter de “blanc” (on me reprochait, enfant, ma peau claire, en France, en Provence, la mode étant alors à cultiver le cancer de la peau et le vide cérébral). Depuis, j’en ai pris mon parti, je ne serai jamais vu ni compris pour ce que je suis, pour ce mélange que si peu peuvent comprendre et respecter. C’est probablement pourquoi j’aime tellement les étrangers et leurs langues.

  8. Et je précise que je m’intéresse à la cafrité entre autres parce que je compte parmi mes ancêtres à la fois des esclaves de plusieurs couleurs (aussi des malgaches et des malabars, et des quasi esclaves, zengagés chinois, je soupçonne, d’après le physique de ma mère, qui n’eût pas déparé dans un roman de Pearl Buck, et des esclavagistes, bien sûr, y compris des affranchis propriétaires d’esclaves.

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