Ponts de Paris (26)

Le Pont de la Concorde traverse la Seine entre la place de la Concorde, quai des Tuileries et le quai d’Orsay. Son nom changea plusieurs fois au fil des événements ; il fut appelé successivement pont Louis XV, Pont Louis XVI, pont de la Révolution, pont de la Concorde, à nouveau pont Louis XVI et définitivement (?) pont de la Concorde depuis 1830.pont de la concorde

Pourquoi ce nom de Concorde ? Le nom aurait été choisi par le Directoire pour marquer la réconciliation des Français après les excès de la Terreur ; la concorde, c’est la fraternité, la bonne intelligence. Comment rester frères après des épisodes aussi sanglants  ? Savez-vous que la guillotine parisienne était installée sur la place de la Concorde (place Louis XV) et c’est là que bon nombre de concitoyens perdirent la tête ? Les deux plus fameux étaient Louis XVI et Marie-Antoinette.

Ceci dit, la guillotine était itinérante (il y en eut tout de même cinquante en activité en France).  Le 11 mai 1793, la Louison (autre nom de la guillotine) avait été fixée, comme à demeure, sur cette place, pour y rester de manière permanente jusqu’au 9 juin 1794 (elle y revint). La guillotine, création du docteur Guillotin et du chirurgien Louis, était connue sous plusieurs noms : Louison, Louisette, la Veuve, et certains l’ont appelée « Abbaye de Monte-à-Regret » (clic pour en savoir plus) comme la potence.

Sur les 2 498 personnes guillotinées à Paris pendant la Révolution, 1 119 l’ont été place de la Révolution. Parmi elles, on retiendra les noms de Charlotte Corday (née un 27 juillet), Danton, la Du Barry, Lavoisier, Chrétien-Guillaume de Lamoignon de Malesherbes… (S’appeler Chrétien pendant la Révolution, et Malesherbes quand on est botaniste… il fallait le faire ; sans compter qu’il fut condamné, guillotiné à plus de soixante-dix ans pour avoir été le défenseur du roi, lors du procès. Et le roi ne l’aimait pas. C’était bien la peine, tant de fidélité, pourquoi ?)

Le premier projet de pont à cet emplacement date de 1725, cependant l’idée de pont en pierres n’est acceptée par Louis XVI qu’en 1772. L’ingénieur Jean-Rodolphe Perronet, premier directeur de l’Institution Nationale des Ponts et Chaussées créée par Trudaine en 1747, conduit les travaux : ce sera le Pont Louis XVI ! Problème : les fonds manquent, et ce n’est que le 11 août 1788, qu’eut lieu la pose de la première pierre. Les travaux vont s’accélérer grâce à  la prise de la Bastille ! En effet après le 14 juillet 1789, une partie des pierres de la forteresse démolie a été utilisée à la construction de ce pont : « afin que les patriotes foulassent aux pieds chaque jour les débris de l’exécrable forteresse ! » En 1791, le pont est achevé, en 1792 il devient le pont de la Révolution, et en 1795 pont de la Concorde. A la Restauration il reprendra son nom d’origine (pont Louis XVI) mais en 1830, Louis-Philippe soucieux d’apaiser le peuple républicain lui redonnera le nom de Pont de la Concorde, nom qu’il porte désormais.

Ce pont de pierre, alors large de 14 m, est composé de cinq arches en arc de cercle, de portée inégale : 25m, 28m, 31m, 28m, 25 m, mais symétriques.

Si le projet de pont avança lentement, sa décoration fut tout aussi chaotique : en 1810, Napoléon I° fit installer huit statues de généraux morts au champ d’honneur ; Louis XVIII les remplaça en 1828 par douze (12) statues monumentales de marbre blanc, représentant quatre (4) grands ministres ( Colbert, Richelieu, Sully, Suger ), quatre grands militaires ( Bayard, Condé, Du Guesclin, Turenne ), quatre grands marins ( Duguay-Trouin, Duquesne, Suffren, Tourville ). Ces statues alourdirent à un tel point le pont, que l’équilibre de l’édifice était menacé : il fallut les enlever. Louis-Philippe les installa à Versailles dans la Galerie Historique, en compagnie de quelques unes des statues de l’Empire.

La circulation étant très dense à cet endroit, encore plus en 1925 au moment de l’exposition des Arts Décoratifs qui se tenait sur le pont Alexandre III, une grande partie de la circulation des voitures qui l’empruntaient allait être reportée sur le pont de la Concorde. Pour éviter les embouteillages, on supprima les trottoirs en conservant de simples garde-roues, ce qui porta la largeur de la chaussée à 13,50 m, et on établit à l’aval du pont une passerelle pour piétons, de 6 m de largeur. Cette situation provisoire devait disparaître à la fin de l’Exposition, mais on se rendit vite compte que le rétablissement de la chaussée à ses dimensions initiales n’était pas envisageable. Le service des Ponts de Paris présenta au début de 1926 un avant-projet d’élargissement. Cependant, la pénurie des crédits à cette époque retarda le projet, jusqu’à ce que le marché définitif soit approuvé le 1er mars 1929 ; les travaux commencèrent en juin 1929 (oh oui, ce fut une bonne année, surtout un certain jeudi d’octobre !) Le pont fut élargi au double de sa taille initiale entre 1930 et 1932. Il a été rénové une dernière fois en 1983 et mesure maintenant 153 mètres de long et 35 mètres de large :  une chaussée de 21 m et deux trottoirs de 7m comme le Pont Alexandre III mais il a conservé sa structure néoclassique voulue par Perronet.

Depuis  1931, les socles sont sans statues. Les réverbères décoratifs initialement prévus n’ont jamais été jamais installés mais le pont de la Concorde offre deux très beaux points de vue, l’un sur la place de la Concorde, l’autre sur le Palais-Bourbon.

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