Privilèges

Sagesse créole, sagesse populaire : proverbes et dictons sont l’expression de cette sagesse populaire par l’énoncé d’une vérité d’expérience que l’on juge utile de rappeler comme celui jadis connu à Grenoble : « le Serpent et le Dragon mettront Grenoble en savon ».  Je vous propose aujourd’hui un dicton créole.

Le dicton constate assez souvent un fait : Bef dovan i boir d’lo prop.

« Le bœuf de devant boit de l’eau propre » ce qui signifie que le premier boeuf arrivé à la mare boit de l’eau claire ; autrement dit le premier arrivé est le mieux servi. Et oui, quand on fait partie d’un troupeau et que l’on avance avec lui, celui qui passe en dernier boit de l’eau trouble, boueuse à souhait, ce qui pourrait justifier les bousculades pour arriver parmi les premiers et même le « ôte toi d’là qu’j’m’y mette ». Voilà, c’est dit, il fallait vous dépêcher.

Mais qui sont les premiers ? Les plus rapides en ce qui concerne les boeufs. En général, les premiers, ce sont les plus forts (les chefs), la famille et les amis des plus forts, les plus rusés… Dit plus simplement : les privilégiés.

Pourtant dans notre beau pays, les privilèges ont été supprimés dans la nuit du 4 août 1789. Événement mythique de la Révolution française que cette abolition mais, dans une société humaine, il ne peut y avoir d’égalité. Alors petit à petit, les privilèges sont revenus et personne ne veut lâcher le peu qu’il a obtenu. Tant pis pour les copains !

Certains, il y a deux ans et demi ont cru à de belles paroles : « Le changement, c’est maintenant » ; ils sont servis. Si la gauche a accédé au pouvoir en faisant campagne sur la réduction des inégalités sociales, elle a oublié bien vite sa promesse : la réforme fiscale n’aura pas lieu, les régimes spéciaux de retraite ne seront pas touchés, la réforme de l’école ne s’attaque pas au fonctionnement du système par contre elle met bon nombre de parents et de communes dans l’embarras ; taxes et impôts augmentent comme le chômage et tant d’autres choses, sauf les salaires qui stagnent et donc le pouvoir d’achat qui, lui, diminue.

Des privilégiés sont aux commandes, non seulement aux plus hauts postes de l’exécutif mais dans moultes collectivités locales et associations, une bourgeoisie économique et culturelle dispose du pouvoir et n’a aucun intérêt au changement qu’elle mettait en avant… avant.