La puce à l’oreille

Connaissez-vous « La puce à l’oreille » ? C’est une expression mais aussi le titre d’un livre de Claude Duneton (un livre toujours au fond d’un de mes multiples cartons, faute de rayonnages adéquats ; j’attends le bon vouloir d’un artisan qui doit fabriquer ma bibliothèque « dès que possible »).

Je me méfierai plus une prochaine fois. Je ferai noter la date de livraison prévue. Je fais confiance ; peut-être que je ne devrais pas compte tenu de l’époque dans laquelle nous vivons. La parole ne se respecte plus guère. Jadis, la parole donnée. avait un prix. « Mais ça, c’était avant« .

Pour en revenir à l’expression « la puce à l’oreille« , elle est souvent liée au verbe mettre ou à l’auxiliaire avoir. Mettre la puce à l’oreille c’est éveiller l’attention, la méfiance, les soupçons. On peut alors, attention éveillée, se douter de quelque chose ou se méfier de quelqu’un.

L’expression a changé de sens au fil du temps. Elle apparait pour la première fois au XIIIe siècle sous la forme « mettre la puce en l’oreille » ; à l’époque les parasites pullulaient dans tous les milieux et  les tourments qu’ils provoquaient occupaient les esprits et les mains (sans doute y avait-il, comme chez les singes, des séances d’épouillage mutuel, de quoi créer du lien social, n’est-ce pas ?). En ces temps-là, l’expression signifiait « provoquer ou avoir un désir amoureux ».

Au XVIIe siècle, l’expression se transforme : un « à » remplace le « en » et, surtout le sens évolue et change totalement, il devient « être inquiet, agité ». Si une puce vient se loger dans notre conduit auditif, il y a de quoi avoir peur, non ? Parallèlement, dès le XIVe siècle, on évoquait déjà les oreilles qui sifflaient ou démangeaient lorsque quelqu’un était supposé parler de vous. C’est probablement l’association de ces bizarres démangeaisons et de l’inquiétude de quelqu’un ayant la puce à l’oreille qui a donné le sens actuel de cette expression.

Cette expression, bien que très ancienne, est redevenue à la mode puisque nos animaux domestiques ont maintenant la puce (électronique) à l’oreille, en guise de tatouage.

Big Brother nous obligera-t-il à être « pucé » nous aussi ?

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Voilà ce qu’a écrit ce monsieur plein de bon sens dans un ouvrage intitulé » A hurler le soir au fond des collèges. » : « Je fais une distinction claire entre le pédagogue et l’enseignant. L’enseignant est quelqu’un qui fait ce qu’il peut, dans des conditions pas toujours faciles, pour instruire des enfants, ou de jeunes adultes, afin de leur transmettre des connaissances, des habitudes de travail et de pensée qui sont les siennes, et auxquelles il a un peu réfléchi. Le pédagogue est un monsieur emporté par une sorte de folie : la pédagogie. Il hache, il découpe les éléments vitaux d’un savoir dont il se moque éperdument, mais qui lui sert de prétexte à des numéros personnels qui sont destinés, au fond, à le mettre lui-même en valeur. Autrement dit, le pédagogue est un enseignant malade.« 

Le problème actuel de l’enseignement en France, c’est qu’il y a de plus en plus de pédagogues et de moins en moins d’enseignants ayant cette vocation.

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