Ce matin, en écoutant la télévision, j’entends cet adjectif rarement utilisé : germanopratin. Terme d’allure savante, il est formé sur des mots latins, germanus : germain et pratum : le pré. C’est un adjectif qui fait référence au quartier parisien de Saint-Germain-des-Prés. Germanopratin, Germanopratine sont des termes qui désignent les habitants du quartier.
Actuellement, le terme se réfère de façon volontairement maniérée au milieu intellectuel parisien car dans les années qui suivirent la Libération, la fin des années quarante et les années cinquante, on parla des « milieux germanopratins » pour définir celui des philosophes existentialistes : Jean-Paul Sartre, Simone de Beauvoir, Maurice Merleau-Ponty et, même s’il refusait cette étiquette, Albert Camus.
L’existentialisme peut être expliqué par la théorie sartrienne : « l’existence précède l’essence », c’est-à-dire que nous surgissons d’abord dans le monde sans but ni valeurs prédéfinies, puis, lors de notre existence, nous nous définissons par nos actes dont nous sommes pleinement responsables et qui modifient notre essence ; à notre mort, notre essence se fige.
`En cela, l’être vivant se distingue de l’objet manufacturé qui, lui, a été conçu pour une fin, et se définit donc plutôt par son essence (qui, en opposition avec l’existence, serait un aboutissement et non un point de départ). Mais philosopher demande du temps…
L’existentialisme avait fini par désigner une mode et un mode de vie. Vivre…
L’adjectif germanopratin se rapporte non seulement au quartier et aux habitants du quartier mais aussi à ceux qui y passaient la nuit pour y faire la fête. Juliette Gréco fut la plus célèbre de ces habitués parmi lesquels on comptait aussi des philosophes, auteurs, acteurs et musiciens, Boris Vian fut l’un d’eux,
Serge Gainsbourg aussi.
Il y avait des cinéastes tels que Jean-Luc Godard et François Truffaut, des poètes comme Jacques Prévert, Louis Aragon et des artistes comme Giacometti. J’en oublie beaucoup. Sacrée faune !
La nostalgie de ce quartier qui a bien changé a commencé dès les années 1960. En 1961, Guy Béart chantait « Il n’y a plus d’après…(à Saint Germain des Prés) ». Juliette Gréco l’a bien sûr chanté, elle aussi.
Nicolas Peyrac évoquait cette époque et ce quartier dans la chanson «Et mon père».
La pilule n’existait pas… Le Sida non plus.
Nostalgie quand tu nous tiens, ça donne aussi «Rive gauche» d’Alain Souchon.
C’était le bon temps ? Sans doute…
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