Vous avez dit « fanatisme » ?

Drôle d’anniversaire ! Drôle de fête ! Le 24 août 1572, jour de la Saint-Barthélemy, dans l’église de Saint-Germain l’Auxerrois, en face du Louvre, les cloches se mettent à sonner, donnant le signal du massacre des protestants, à Paris et dans tout le reste du pays.

Massacre ! Oui, c’est bien le jour le plus noir des guerres entre catholiques et protestants de France (il y a eu d’autres tueries organisées et oubliées, celles des Cathares par exemple). Ces «guerres de religion», catholiques contre protestants, ont ensanglanté le pays pendant plus d’une génération. Et ça continue ailleurs. Je ne reviens pas sur toutes les horreurs des guerres intestines, je pense en particulier à l’Irlande… Pour moi, j’ai appris, il y a longtemps à l’école laïque, que la Saint Barthélemy est le symbole universel du fanatisme. (On a fait mieux depuis, ailleurs, mais on est cocardier ou on ne l’est pas. Un bon classement, ça ne se refuse pas.)

Tout (ou presque) a commence par un mariage, le 18 août 1572. Ce jour-là, Henri de Navarre (le bon roi Henri, Henri IV, le Vert-Galant – un précédent DSK ? -, celui de la poule au pot) épouse Marguerite de Valois, soeur du roi Charles IX (surnommée plus tard la reine Margot).

Les invités de la noce, catholiques ou parpaillots (j’aime bien parpaillots pour huguenots ou protestants ; un mot doux «parpaillot» qui vient de papillon en occitan : lo parpalhòl ; vous avez compris, j’ai choisi mon camp), sont excités. La rumeur d’une prochaine guerre contre l’Espagne catholique du roi Philippe II court. Depuis plusieurs mois, Gaspard de Coligny, chef de la faction protestante et principal conseiller du roi, tente de convaincre ce dernier d’envahir la Flandre, possession espagnole. Les chefs de la faction catholique, à savoir les frères de Guise et le duc d’Anjou, frère du roi Charles IX (qui lui succèdera plus tard sous le nom d’Henri III) ne veulent à aucun prix de cette guerre. La reine-mère, Catherine de Médicis, n’en veut pas davantage.

Le matin du 22 août, soit quatre jours après le mariage princier, un capitaine gascon blesse Coligny de deux coups d’arquebuse. Le roi se rend au chevet de son conseiller qui l’adjure de ne pas chercher à le venger. Malgré les recommandations de Coligny, les chefs protestants réclament justice. Au palais du Louvre où réside le roi de France, Catherine de Médicis craint d’être débordée par les chefs catholiques qui reprochent au roi de trop ménager les protestants. Pour sauver la monarchie, elle décide d’anticiper et de faire éliminer les chefs protestants (à l’exception des princes du sang : Condé et Navarre, son nouveau gendre).

Le 24 août, fête de la Saint Barthélemy, avant le lever du soleil, Coligny est égorgé dans son lit. Son cadavre est jeté dans la rue, livré à la populace.

Les «nettoyeurs» Catholiques arborant une croix blanche sur leur pourpoint ainsi qu’une écharpe blanche, poursuivent le massacre dans le quartier de Saint-Germain l’Auxerrois : deux cents nobles huguenots venus de toute la France pour assister aux noces princières sont tués. Les cadavres sont rassemblés dans la cour du Louvre. Certains protestants, prévenus à temps, arrivent à s’enfuir avec les sbires des Guise aux trousses.

Entendant sonner le tocsin, la population parisienne sort dans la rue, apprend le massacre. C’est alors la curée. Les malheureux protestants, hommes, femmes, enfants, sont traqués dans la ville, et même jusque dans leur lit, mis à mort. Certains en profitent pour piller les biens des victimes.

À la mi-journée, le roi ordonne d’arrêter mais les ordres ne sont pas respectés. Le roi assume la responsabilité des événements en expliquant que Coligny avait ourdi un complot et qu’il avait dû l’exécuter.

Le nombre total de victimes dans l’ensemble du pays s’élève à 30.000 (plus que sous la Commune de 1871, seulement… 20 000).

Ah, l’odeur du sang rend fou les requins et les Hommes.

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