Proverbe créole

J’aime la Réunion même si je suis vraiment de plus en plus nostalgique de la métropole. J’aime la Réunion pour de nombreuses raisons mais j’ai vraiment besoin de retrouver mes racines. Est-ce l’idée de partir qui me donne envie de vous parler de cette île et de sa langue : le créole ?

Bien sûr, il y a du débat là-dessous, revoir mon article « pas de créole à l’école » (clic) mais je ne veux pas débattre maintenant, je veux juste vous faire connaître quelques expressions qui valent leur pesant d’or. Je vous parlerai demain de cette expression « valoir son pesant d’or« . Pour l’heure, je reviens à mes proverbes créoles ou plutôt au proverbe du jour.

C’est évidemment à l’oral que le proverbe créole se transmet. C’est là qu’il est le plus à son aise, comme en français, encore que certains d’entre eux ne sont plus compris par les jeunes à la Réunion comme en métropole. Je me souviens que ma grand-mère me disait, quand je ne voulais pas manger : « Huit jours sous una benate ».

Je lui répondais « Mémé, qu’est-ce tu dis ? »

Savoyarde ou dauphinoise, l’expression m’était expliquée : « Pour éviter qu’une poule couve trop longtemps, on la mettait huit jours sous une benne (un grand panier), et à la sortie, la pauvre poule avait faim et soif. Elle était « découvassée ». Enfin elle ne couvait plus et pouvait recommencer à pondre, vivre sa vie de poule pondeuse, quoi ! Alors, si tu n’as pas faim, si c’est pas bon, tu veux pas manger ? Huit jours sous une benne et tu mangeras bien n’importe quoi  à la sortie. »

J’essayais d’imaginer la taille du panier, le lieu où Mémé pourrait le mettre et surtout avec quoi elle pourrait le bloquer. Je ne me suis jamais laissée faire sans rien dire. Souvenez-vous de mes cris à la cave (clic).

A contrario quand j’avais faim, la réponse était invariablement : « attends l’heure ! Ce n’est pas l’heure… Tu as faim, mange ta main et garde l’autre pour demain ».

La tradition des proverbes est orale, à la Réunion, encore plus qu’ailleurs, peu ou pas de traces dans les œuvres des auteurs du passé qui, la plupart du temps écrivaient en langue française, le créole étant la langue du bas peuple, des Cafres, des gens de couleur.  La langue parlée reste donc le lieu privilégié de circulation du proverbe même si les journaux, aujourd’hui, en citent quelquefois.

Je vous donnerai donc de temps en temps un proverbe créole de la Réunion, écrit en créole. Ensuite, la traduction puis l’explication. Je commence  par du très facile :

« Ti zanfan ti traka, gran zanfan gran traka »

Petits enfants, petits soucis, grands enfants, grands soucis. Faut-il expliquer ? Les soucis des parents grandissent avec l’âge des enfants. Si vos enfants sont grands et ont du mal  à trouver un emploi malgré leurs diplômes, vous comprenez sans difficulté, d’autant qu’avant, vous vous  êtes inquiétés pour leurs examens, les concours, les moyens de payer les inscriptions aux concours, en écoles d’ingénieurs, le logement, les voyages… sûrs que vous étiez qu’en leur donnant un bon bagage (intellectuel), ils allaient s’en sortir très bien dans la vie.

Raté. Si vous n’êtes pas un V.I.P., vos enfants cumuleront, dans le meilleur des cas, les petits boulots mal payés ou survivront avec le RSA.

Quelle belle vie ! Pas celle que vous aviez imaginée pour eux.

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