Jeter l’argent par les fenêtres

Je ne sais pas ce que vous en pensez mais je trouve que nos élus, tous ceux qui nous gouvernent et sont censés gérer l’argent public, s’en servent pour conserver leurs privilèges et,  bien souvent, le jettent par les fenêtres en espérant garder leur place (bien bonne).

Seule la place de maire d’une petite commune n’est pas très enviable, à tel point que, dans de plus en plus de petites communes de France, personne ne veut se présenter à la place de maire, on juge la tâche trop complexe, trop prenante, trop risquée.

Près de 30% des maires sortants ont choisi de ne pas se représenter lors des prochaines élections municipales. Comme disent les plus jeunes « ça craint ! ». Beaucoup trop de responsabilités. Le haut de l’état se décharge vers les régions, les départements ou les communes tout en gardant la recette des impôts. Du coup les impôts locaux grimpent, comme ceux de l’État. Nous sommes de plus en plus pressurés par le fisc. Et pour quoi faire ? Entretenir des incapables, des maitresses, des bâtards comme au temps de la monarchie.

J’arrête là pour la politique mais je reviens à l’expression « jeter l’argent par les fenêtres » qui signifie être dépensier. Mais d’où vient-elle ?

À Naples, les habitants respectent la coutume du capodanno, le jour du Nouvel An, de jeter par les fenêtres les vieux objets dont ils ne se servent plus. Ils symbolisent ainsi la mort de cette année qui s’achève. « Grâce » aux médias, la coutume s’est installée dans le quartier de Hillbrow à Johannesburg, « coutume » aussi dangereuse qu’insolite : des meubles et des appareils électroménagers usagés sont jetés par les fenêtres.

Si la coutume gagnait la France ce serait un retour en arrière puisque jadis, les gens jetaient tout par les fenêtres : les épluchures et le contenu des pots de chambre. Je vous laisse imaginer l’odeur des centres-villes. Il y avait des règles de savoir-vivre cependant, on criait « gare l’eau » avant de jeter les eaux sales. Les rues étaient dangereuses.

Au XVII° siècle, la prodigalité se traduisait par « jeter les épaules de mouton par la fenêtre » et d’un bon gestionnaire on disait qu’il ne jetait pas son bien par les fenêtres. L’expression « jeter l’argent par les fenêtres » (toujours plusieurs) est apparue au XVIII° siècle.

Pendant longtemps, jusqu’au milieu du XX° siècle, les artistes des rues (les chanteurs essentiellement) recevaient des pièces qu’on leur jetait par les fenêtres en paiement de leur prestation mais je ne peux m’empêcher de vous raconter la largesse gouvernementale de l’époque de la Restauration, ça vous permettra peut-être de faire une relation avec ce que nous vivons aujourd’hui.

En 1817, le gouvernement voulait faire adopter par la Chambre des députés une mesure impopulaire (La loi Lainé, une nouvelle loi électorale censitaire (réservant le vote aux personnes payant un certain niveau d’impôts : moins de 90 000 Français pourraient voter), le gouvernement distrayait donc l’opinion publique en organisant des événements factices. La police en était chargée, aujourd’hui il y a les médias.

La police fit donc pleuvoir, dans la rue Montesquieu, de petites pièces d’argent, sans que l’on puisse savoir d’où elles provenaient. Les badauds s’attroupèrent, de plus en plus nombreux, durant plusieurs jours et dans Paris on ne parlait plus que de cette mystérieuse pluie qui recommençait chaque jour. Certains disaient que c’était une tentation du diable et que tous ceux qui toucheraient à cet argent seraient damnés mais la vie était dure (en juin 1817, la crise des subsistances atteint son paroxysme, le coût de la vie son maximum, le prix du blé était passé de 21 francs l’hectolitre en novembre 1815, à 38 francs un an plus tard et à 58 francs 75 en juin 1817).

La pluie cessa dès que la loi fut votée ; elle avait coûté 30 000 francs au « budget des fonds secrets » (ça existait et sans doute, cela existe-t-il encore, non ? ).

Commentaires

13 réponses à “Jeter l’argent par les fenêtres”

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *